Une personne atteinte de surdité peut-elle conduire une voiture ?
Tout le monde n’est pas autorisé à conduire une voiture. Bien entendu, seuls les conducteurs titulaires d’un permis de conduire valide peuvent le faire. Et bien sûr, ils doivent être correctement assurés.
Mais quand votre permis de conduire est-il valide et quand êtes-vous suffisamment assuré ?
La chose la plus importante semble être le permis de conduire, car vous ne pouvez bénéficier des droits de votre assurance que si votre permis de conduire est en règle. Vous obtenez le permis de conduire en passant d'abord l'examen théorique. Ensuite, vous suivez un cours de formation pratique afin de réussir l'examen pratique.
Êtes-vous sûr que votre permis de conduire est ou restera valable après cela ? Non. En fait, il n'y a pas deux, mais trois examens à passer. En effet, il existe une troisième condition à laquelle doit satisfaire tout conducteur d'un véhicule pour lequel un permis de conduire est requis. Cette troisième condition concerne la santé. Il s'agit donc d'aspects médicaux. Une personne malvoyante ne peut obtenir une « autorisation médicale » que dans des conditions très strictes. Cela s'applique-t-il également aux personnes malentendantes ?
La réponse est : « non ». Les critères médicaux fixés par la loi ne font pas état de conditions pour ce qui est de l’audition. Ça n’a rien de si surprenant. On estime en effet que près de 90% des informations traitées durant la conduite le sont visuellement. Les informations auditives sont proportionnellement beaucoup moins importantes. Et souvent ce que vous entendez dans la circulation correspond aussi à ce que vous voyez.
Il convient de nuancer quelque peu les propos. Il n’y a pas de conditions pour ce qui est de l’audition mais il existe des conditions préalables concernant l’équilibre. Ces deux fonctions sont liées d’un point de vue anatomique. Mais quelqu’un qui est « seulement » sourd ou malentendant ne doit pas par définition se faire du souci pour l’obtention de son permis de conduire.
Ainsi, même s'il n'y a pas lieu de s'inquiéter quant à la validité du permis de conduire, le fait de l'obtenir peut représenter un défi.
L'apprentissage de la théorie est une chose que tout candidat conducteur devrait faire. Cependant, une personne malentendante ou sourde bénéficie de moins d’instructions et d’explications verbales, voire n’en jouit pas du tout. Elle est donc plus limitée au niveau des possibilités de communication que les candidats bien-entendants. C'est également le cas de l'examen théorique. Le candidat moyen peut recevoir à la fois la question oralement et par écrit. La personne sourde ou malentendante, non.
À première vue, cet inconvénient semble peut-être plutôt limité. Il joue néanmoins un rôle plus important au cours des prochaines phases de l’obtention du permis de conduire. L’importance de la communication verbale lors de la formation pratique et de l’examen n’est pas à sous-estimer. Quant à l'apprentissage de la conduite, vous serez encadré par votre instructeur pendant que vous conduisez. Vous pouvez donc conduire et écouter en même temps, sans avoir à quitter la route des yeux. Pour les malentendants ou les sourds, c'est différent ! Ce que le candidat bien-entendant « entend » de l’instructeur, le candidat malentendant ou sourd doit généralement le lire sur les lèvres et/ou utiliser la langue de signes ou l’écrit. Les deux formes de « communication visuelle » nécessitent un changement de regard et constituent dès lors potentiellement un danger. C’est un inconvénient indéniable.
Ceci vaut aussi pendant l’examen. L’examinateur donne généralement les instructions oralement. La personne sourde ou malentendante est dans ce cas également lésée. En effet, toute contrainte supplémentaire sur le système visuel le désavantage.
Bien sûr, il existe des solutions créatives. Par exemple, nous savons que pendant l'examen, on peut procéder avec de légères touches pour indiquer la direction souhaitée (une touche à gauche, deux touches à droite). Le toucher physique n'est possible que lorsque les deux partenaires de communication se sentent à l'aise. On peut donc aussi penser à des systèmes où l'instructeur ou l'examinateur tape des messages sur une tablette, qui sont ensuite affichés sur un autre support facilement visible pour le candidat. Il s'agit là d'une atteinte à la vie privée, moins invasive mais c’est « visuellement » plus contraignant.
En bref, le candidat sourd ou malentendant peut décrocher son permis de conduire mais ça représente un défi supplémentaire.
« Mais si les personnes sourdes et malentendantes ne sont pas nécessairement des conducteurs dangereux, pourquoi conseille-t-on aux autres conducteurs de ne pas conduire en écoutant de la musique bruyante ? Il s’agit de la même situation, non ? »
Les deux situations ne sont pas tout à fait comparables. Les personnes souffrant d’un problème auditif utilisent leurs autres sens plus efficacement pour compenser le handicap éventuel. D'autre part, la musique bruyante perturbe l'attention ; en d'autres termes, elle est source de distraction. Le handicap auditif n'a pas ce désavantage « cognitif ».
Mark Tant, PhD
Responsable du CARA, Institut Vias